80 ans du droit de vote des femmes en France

Dominique Vérien, Sénatrice de l’Yonne et Présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes au Sénat

 Le 21 avril 1944 est une date qui marque l’histoire de notre République. Le Général de Gaulle signe l’ordonnance portant organisation des pouvoirs publics après la Libération pour que les femmes deviennent “électrices et éligibles dans les mêmes conditions que les hommes.”

 

Pourquoi cette réticence à accorder le droit de vote aux femmes ?

Parce que le modèle commun consistait à créer une famille où la femme restait au foyer, dépendant ainsi de son mari comme en dépendaient les enfants. La gauche se disait donc que, toutes dépendantes que ces femmes étaient, elles voteraient comme leur mari, à savoir pour un système bourgeois, oubliant que des femmes étaient aussi ouvrières, qu’elles pouvaient être dépendantes financièrement, mais rêver d’autonomie… Mais de droite comme de gauche, les hommes pensaient pour les femmes qui, on le sait bien, n’y comprenaient rien à la politique.

 

Idiotes, les femmes ?

Marie Curie a eu son prix Nobel en 1911 (je ne compte pas celui de 1903 qui était partagé avec des hommes, dont son mari, ce qui risquerait de la disqualifier), mais elle est morte sans pouvoir voter. Colette, elle, a attendu ses 71 ans pour pouvoir se rendre aux urnes, Marie Laurencin ses 60 ans, Elsa Triolet ses 48 ans, Edith Piaf ses 39 ans. Idiotes ? Dépendantes ? Un grand nombre de femmes ont reçu des honneurs comme la Légion d’honneur, les palmes académiques, l’ordre du mérite, le mérite agricole sans pour autant avoir le droit de vote !

Olympe de Gouges, dès 1791, disait que puisqu’une femme pouvait monter à l’échafaud, elle devait pouvoir monter à la tribune. Et pourtant, il fallut attendre 153 ans encore pour que son souhait se réalise. 

Les femmes au foyer non politisées n’y virent pas une véritable évolution, ce fut donc dans un premier temps plutôt des femmes engagées qui fréquentèrent les urnes. Puis, petit à petit, l’égalité entre les hommes et les femmes progressant, on ne s’étonna plus de voir des femmes voter ni même se présenter à des élections… même s’il faudrait créer de meilleures conditions pour avoir plus de candidates.

 

Mais 80 ans plus tard, ce n’est plus le fait que des femmes votent qui interroge, mais le fait que la plupart des électeurs boudent le chemin des urnes tant ils considèrent qu’il ne mène à rien. Retrouvons le sens du vote, nous trouverons alors plus de candidatures, y compris féminines et bien entendu, plus d’électeurs.