La France, l’Union européenne et notre compétitivité agricole
Philippe Rouault, Adjoint au maire de Pacé (Ille-et-Vilaine) et Ancien délégué interministériel aux industries agroalimentaires et à l’agro-industrie
La compétitivité de l’agriculture française et européenne est freinée par la complexité des règles administratives, la longueur des procédures et, en France plus particulièrement par la surtransposition des directives européennes. La montée en gamme s’est faite au détriment des produits alimentaires standards, qui faute d’offre nationale a entrainé une forte croissance des importations.
Les tensions internationales mettent en évidence l’importance de la souveraineté alimentaire européenne au même titre que celle de la défense et l’énergie.
La France
La balance commerciale agricole et agroalimentaire de la France est déficitaire si l’on exclut les alcools. Le déficit de production en viande bovine, porcine et volailles dépasse un milliard d’euros, tandis que l’excédent de production laitière, autrefois de 30 %, est tombé à 8 % en quelques années et pourrait devenir déficitaire d’ici moins de 5 ans. Quant à la production de fruits et légumes, le déficit est abyssal.
Des initiatives nationales visant à simplifier le cadre règlementaire sont en cours, notamment avec la loi d’orientation agricole et la proposition de loi de notre collègue Franck Ménonville visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur.
Une vigilance particulière devra être apportée à la rédaction des décrets d’application afin d’en respecter l’esprit.
La première étape de la décarbonation repose sur la relocalisation des productions déficitaires, pour lesquelles la France dispose d’un savoir-faire d’excellence et de conditions naturelles idéales (sols, climat). Réduire la production nationale pour favoriser les importations et encourager des modes de production ne respectant pas nos standards sanitaires et environnementaux est une aberration. La décarbonation doit s’envisager à l’échelle planétaire.
L’Union européenne
La Commission européenne a enfin pris en compte le contexte géopolitique mondial et décidé de renforcer la souveraineté alimentaire de l’Union. Elle a ainsi abandonné la stratégie « Farm to Fork » (de la ferme à la fourchette).
La question de la compétitivité est désormais abordée avec des objectifs de simplification des règles environnementales et des engagements en matière de réciprocité des normes pour les importations. Toutefois, il faudra rester extrêmement vigilant quant à la mise en application de ces mesures, notamment dans la future PAC, afin de garantir qu’elles redonnent à la production européenne une compétitivité nécessaire pour affronter la pression des importations mondiales.
Un objectif de compétitivité et de souveraineté
Seule l’amélioration de notre compétitivité permettra d’accroître la production agricole et alimentaire et de retrouver une autosuffisance globale. Cet objectif n’est en rien contradictoire avec une meilleure protection de l’environnement ; bien au contraire, il pourrait permettre de mobiliser davantage de ressources et de créer des emplois à tous les niveaux des filières, tout particulièrement dans nos zones rurales. L’agriculture et l’industrie agroalimentaire étant présentes sur l’ensemble du territoire français, elles constituent un levier essentiel pour le développement économique de nos régions.