L’agriculture : un secteur pourtant si stratégique

Christophe Terrain, Maire Riscle (32) et agriculteur à la retraite

Les Français l’ont bien compris, car ils savent ce qu’apporte l’agriculture en termes alimentaires, d’aménagement du territoire, de façonnement des paysages et plus globalement en termes socio-économiques. Ils savent aussi que les exploitations agricoles demeurent, pour la très grande majorité d’entre elles, des entreprises familiales intégrées, avec leurs partenaires de l’amont et de l’aval, dans le tissu économique local et réparties sur l’ensemble du territoire : zones de montagne, zones intermédiaires, zones de plaine.

Les Français l’ont non seulement compris, mais ils mesurent toute l’importance stratégique du secteur agricole et de ses acteurs pour lesquels ils manifestent leur empathie et soutien.

Le sud-ouest de la France et ses deux régions, Nouvelle-Aquitaine et Occitanie, et le gersois que je suis, sont pleinement mobilisés et solidaires de cette France agricole en effervescence, car ils y subissent tous les ingrédients d’une politique agricole en panne, voire déconnectée des réalités que vivent au quotidien les agriculteurs dans leurs exploitations.

Le sud-ouest de la France a en effet de nombreuses caractéristiques agricoles : un réel tissu agricole avec des exploitations majoritairement de taille moyenne, un potentiel agronomique souvent difficile et des conditions climatiques loin d’être optimum… Autant de caractéristiques et de points de faiblesse qui expliquent la construction économique agricole de ces régions, mais qui en font aussi sa diversité et sa richesse : une multiplicité de productions, des filières spécialisées à valeur ajoutée, des outils économiques de transformation et de valorisation, des dispositifs de contractualisation entre maillons de la chaîne agroalimentaire. Tout cela peut bien sûr se raconter, mais d’abord se voit dans un paysage agricole où se côtoient les productions de blé dur, de semences, de volailles, de vin, de maïs, de bovins, de légumes…

Alors, veillons à ne pas abîmer cela, à ne pas sacrifier de tels atouts par une méconnaissance du terrain et de ses points de force. Il ne s’agit pas pour moi de dresser un catalogue à la Prévert, mais il a des préalables incontournables auxquels les Pouvoirs publics doivent répondre :

 

  • la reconnaissance de l’acte de production et du potentiel dont dispose la France et ses régions pour répondre aux besoins alimentaires du territoire national et au-delà : les agriculteurs ne sont pas que des « jardiniers de la nature », mais des acteurs économiques à part entière,
  • la « surbureaucratisation » de la politique agricole européenne, qui plus est complexifiée par la France et de l’excès de normes voire de normes incohérentes avec le « bon sens » agronomique et économique,
  • l’inéquité de traitement entre les productions françaises et importées,
  • la gestion de la ressource en eau afin de permettre l’irrigation indispensable à certaines productions,
  • la mise à disposition des facteurs de production et des innovations indispensables à une conduite économiquement raisonnée des exploitations (produits de protection des plantes, génétique…),
  • une réelle prise en compte des coûts de production dans les relations contractuelles entre les acteurs d’une filière, du producteur au consommateur,
  • des procédures et actions conduites par des mouvements et organisations prônant la décroissance, une écologie punitive et surtout constituant un frein intolérable au développement agricole.