Le Plan Protection Solidaire : pour une nouvelle justice sociale

Franck Pia, Maire de Beauvais

Après le quoi qu’il en coûte de la crise sanitaire, la solidarité nationale généreuse mais cloisonnée crée des crispations et favorise l’émergence d’un sentiment d’injustice sociale. Paradoxalement, avec la multiplication des aides ciblées observée ces dernières années, le gouvernement laisse planer le mirage d’un droit à la solidarité constant et intarissable qui écarte toute forme de responsabilisation de ses bénéficiaires et fait de la classe moyenne la laissée-pour-compte d’un contrat social ébréché.

Trop éloignée de la réalité quotidienne de chaque bénéficiaire la solidarité nationale apporte une réponse unique et emprunte d’égalitarisme alors qu’elle devrait au contraire s’exprimer avec justesse, être mesurée et équilibrée.

En s’extirpant d’un droit à sens unique obéissant à l’automatisme cartésien, la solidarité nationale doit renouer avec sa mission protectrice. Elle doit se concevoir comme une garantie offerte à tous pour faire face à une situation difficile mais aussi comme une opportunité d’aller de l’avant et pas simplement comme un droit à sens unique.   La solidarité nationale n’est pas une fin mais un moyen, elle doit se mériter mais aussi, et surtout, s’accompagner.

Pour cela, l’administration à l’initiative de l’intervention sociale doit être accessible, à l’écoute et maintenir une véritable proximité capable de rétablir la relation de confiance qui unit la solidarité aux citoyens et garantit l’existence d’une justice sociale efficiente.  Or, avec le développement du tout numérique on observe une déshumanisation de l’administration qui participe indéniablement à l’enlisement des situations sociales complexes mais aussi au taux record de non-recours. Ce constat est encore plus prégnant dans le secteur rural.

Notre pays doit aujourd’hui s’engager dans une refonte globale de ses pratiques afin de passer progressivement d’une solidarité curative vers une solidarité préventive qui évite le basculement et combat activement la passivité des bénéficiaires. Il importe pour cela de redonner à la solidarité toute sa spontanéité, toute son humanité et lui permettre d’être réactive en sortant les institutions publiques de la logique de guichet.

Les collectivités locales, notamment à travers leurs CCAS ou leurs CIAS, par leur proximité et leur travail de terrain quotidien sont des chevilles ouvrières de la refondation de la politique sociale de notre pays. Elles fourmillent d’expériences innovantes et audacieuses que l’état doit soutenir et encourager.

A travers l’expérience beauvaisienne, il est permis d’affirmer que bien plus que l’importance des moyens financiers mobilisés en aides directes, ce sont la qualité de l’accompagnement et les moyens humains mis en œuvre qui garantissent aux bénéficiaires une solidarité solide, fiable et efficace qui leur permet d’envisager sereinement l’avenir.