Le groupe UDI Île-de-France a déposé un vœu qui sera examiné demain en séance publique. C’est une première dans notre pays : un Conseil Régional va être appelé à se prononcer pour demander officiellement à l’État d’expérimenter une régionalisation de la Santé !

« À force de tout faire, la seule chose que l’Etat ne fait plus, ce sont ses missions régaliennes : quand l’Etat s’occupe de tout, il s’occupe mal de tout. Nous croyons aux libertés locales : que l’Etat s’occupe des fonctions régaliennes et qu’il décentralise le reste. C’est le sens de notre projet d’une République Fédérée. »

Cette conviction exprimée par le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde illustre l’un des piliers du projet politique de notre famille démocrate : c’est en rapprochant au maximum le citoyen de la prise de décision, en confiant chaque compétence à la plus petite entité capable de l’exercer que la France retrouvera le chemin de l’efficacité publique et deviendra pleinement une démocratie moderne.

La pandémie de Covid-19, révélatrice des faillites de la centralisation du système de santé

À ce titre, la crise de la Covid a mis en lumière l’incapacité de l’Etat centralisé à piloter notre système de santé : des pans entiers du territoire sont délaissés par les médecins, la centralisation des soins vers l’hôpital et les urgences s’est accélérée, nos professionnels de santé étouffent sous la bureaucratie, et l’égalité d’accès à la santé n’est plus assurée. Pire, alors que la France est le pays de l’Union Européenne qui dépense le plus pour son système de santé (11,2% du PIB), nos soignants font partie des plus mal rémunérés du continent. La souffrance de ces derniers n’a d’ailleurs jamais été aussi forte : or, sans soignants, il n’y a plus de santé.

L’échec de cette centralisation est indéniable. Pour remettre sur pied notre système de santé, l’ampleur du travail est telle qu’elle ne peut être conduite qu’à l’échelle d’entités plus petites et donc plus agiles et plus souples que l’échelon national. La crise du Covid l’a démontré sur notre territoire : c’est la Région Île-de-France qui a pallié aux failles de l’Etat au début de la pandémie ! Notre majorité avait ainsi commandé 30 millions de masques distribués aux professionnels de santé, installé un maillage unique en France de points de tests avant les fêtes, soutenu le monde économique et culturel, mis en place un fonds d’équipement d’urgence pour les professionnels de santé, mis à disposition des lits d’internat dans les lycées franciliens, rémunéré des étudiants infirmiers volontaires etc.

Ailleurs dans le monde, le principe d’une gestion centralisée de la santé n’est d’ailleurs plus considéré comme un optimum indépassable. Au Danemark comme en Finlande, la gestion des services de santé est totalement décentralisée au niveau des municipalités et des communes. Les länders allemands, eux, ont géré leur système de santé avec un succès réel alors que le pilotage de l’ensemble des hôpitaux, de la médecine de ville et du médico-social leur revient. Ces exemples démontrent que les modèles de santé les plus efficaces ne sont pas les plus coûteux mais les mieux organisés : sauver notre système de soins à coups de milliards est une promesse vaine, une fuite en avant budgétaire qui nous éloigne de l’objectif réel que doit être la réorganisation des structures et des méthodes de travail. 

Un modèle de gouvernance régionale de la Santé en Île-de-France

Nous proposons que l’Etat se recentre sur l’essentiel et assure la seule mission qu’il est aujourd’hui incapable de garantir : une vraie égalité de traitement entre les citoyens, en confiant à la Région un budget global pour son système de santé, un ONDAM régionalisé. Ce budget régionalisé confié à l’Île-de-France dépendra enfin de données objectives comme la démographie ou l’état de santé de la population.

Une fois ce budget confié à la Région Île-de-France, nous demandons à l’Etat de décentraliser pleinement l’ARS en la plaçant sous la tutelle de notre collectivité. Il est indispensable que cette future ARS régionalisée soit amenée à piloter l’ensemble de notre système de soins, ce qui inclut par exemple :

  • la définition de la carte hospitalière (nombre de lits, de sites, organisation des spécialités etc.) ;
  • le pilotage et la régulation des des soins ambulatoires (médecine de ville) ;
  • la santé au travail, en fusionnant l’Aract, les Carsat et les agences régionales de l’OPBTP ;
  • la responsabilité de la médecine scolaire afin de favoriser son interaction avec la médecine de ville et l’hôpital sur un territoire ;
  • la prévention ;
  • un nouveau pôle médico-social unifié, co-géré avec les départements, absorbant les Caisses d’Allocation Familiales et les missions de la Direction Générale de la cohésion Sociale.

Ce périmètre ne prétend pas à l’exhaustivité : les différentes missions qui seraient décentralisées devront naturellement être définies avec le Ministère de la santé en parfaite coopération et collaboration avec les différents conseils de l’ordre, les URPS, la CPAM, les associations de soignants et de patients, et les syndicats.

En confiant à la Région un budget global et en cassant le cloisonnement budgétaire actuel imposé par l’Etat, nous aurons la liberté de répartir les moyens sur nos territoires de manière plus souple, en imposant de nouveaux équilibres entre l’hospitalisation publique, privée, la médecine de ville ou les services médico-sociaux.

Notre famille politique porte ce projet de régionalisation de la santé depuis de longues années : déjà, en 2000, Jean-Luc Préel, Jean-Louis Borloo et André Santini avaient déposé une proposition de loi relative à la régionalisation du système de santé. Jean-Christophe Lagarde et l’UDI continuent de le porter dans leur projet national, conformément aux propositions portées dans notre contribution au Ségur de la Santé.

La régionalisation peut et doit être un remède à l’incapacité de l’Etat central de réformer notre système de santé au-delà de simples mesures paramétriques. En effet, en confiant à la Région Île-de-France le pilotage de la santé, notre Assemblée sera chargée de définir de nouvelles politiques publiques pour rendre notre système de soins moins coûteux pour le contribuable, plus efficace et humaniste pour les malades, et plus juste pour nos soignants. Elle nous permettra de créer un véritable partenariat avec le monde associatif des soignants et des soignés.

Si l’objet de ce vœu n’est pas de formuler des mesures nouvelles qu’il appartiendra au Conseil régional et à l’exécutif de définir une fois que nous piloterons l’ensemble du système des soins, il est fondamental de préciser que cette liberté nouvelle permettra de travailler sur la tarification, l’installation, la dé-bureaucratisation du temps médical et paramédical, la rémunération etc.

Par ce vœu, le Conseil Régional mandate la présidente pour prendre toutes les initiatives nécessaires auprès du gouvernement et du Parlement afin de permettre l’adoption des textes législatifs et réglementaires nécessaires à ce que la Région Île-de-France déroge à titre expérimental aux dispositions législatives régissant l’exercice des compétences de l’Etat sur la santé.