Toucher des aides et en même temps verser des dividendes : ce n’est pas humaniste !

« Les entreprises ayant bénéficié d’aides d’État durant la période de confinement ne doivent pas verser de dividendes cette année. »

 

Michel Zumkeller nous explique, en détails, le sens de cette proposition de loi. ↩

Alexandre IMPERIALE :

Monsieur ZUMKELLER, vous êtes député UDI du Territoire de Belfort et vous êtes l’auteur d’une proposition de loi visant à interdire aux entreprises ayant sollicité l’aide publique – dans le cadre du coronavirus – de distribuer des dividendes.

Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur cette proposition de loi que vous venez de déposer ?

 

Michel ZUMKELLER :

L’idée m’est venue en surfant sur internet.  Alors qu’il paraît évident que quand on touche des aides d’État dans une situation pareille, on ne devrait pas avoir besoin de percevoir des dividendes, j’ai constaté qu’il y avait certains chefs d’entreprises, fort heureusement pas tous, qui, visiblement, se disaient : « Moi, je vais continuer à percevoir mes dividendes » et souvent ce sont des sommes très importantes.

Alors je me suis dit : on parle ici d’un monde qui doit changer.  La situation d’aujourd’hui, est sanitairement catastrophique mais elle doit aussi nous amener à changer nos comportements.

 Je me suis aussi dit « Il y en a qui n’ont rien compris » et donc qu’il serait temps de border les choses. C’est la raison pour laquelle j’ai souhaité rédiger cette proposition de loi.

La deuxième raison est qu’il me semble cohérent de dire :  On a des entreprises qui sont dans la difficulté, qui doivent être aidées. Ainsi, l’État va les aider mais aussi l’impôt du contribuable.  Donc, on ne peut pas, alors qu’on demande à être aider, profiter de la situation et continuer à verser des dividendes. Cela était déjà, dans beaucoup de cas, assez difficilement compréhensibles par nos concitoyens.

 

Alexandre IMPERIALE :

D’accord, nous comprenons mieux votre démarche.

Vous avez aussi expliqué que votre démarche visait à sanctuariser ce que le gouvernement n’a pas eu le courage de concrétiser dans la loi. En fait, vous voulez  être un garde-fou.

 

Michel ZUMKELLER :

C’est cela, parce que j’ai bien entendu que le gouvernement, conseille aux entreprises de ne pas le faire. C’est bien gentil. Comme je l’ai dit, il y a plein de chefs d’entreprises qui seront respectueux, mais il y a plein d’autres qui ne le seront pas. 

Je crois que vu l’urgence de la situation, en tant qu’humanistes, nous devons considérer que l’être humain est important.

Toucher des aides, c’est normal et nécessaire pour soutenir l’activité économique. Mais maintenant, il faut marquer les choses.

Si on a touché des aides dans le cadre du COVID, on ne doit pas verser de dividendes. 

 D’un autre côté, cette proposition est logique. On touche les dividendes quand l’entreprise va bien. Malheureusement, elle ne va pas bien aux vues de la situation. Il serait totalement illogique de continuer à percevoir des dividendes.

Mais alors que ça pourrait paraître évident, il semblerait qu’il soit très important que la loi cadre bien les choses.

 

Alexandre IMPERIALE :

D’accord, mais pour que l’on comprenne bien : on sait que beaucoup d’épargnants individuels, de petits épargnants ont un plan épargne, par exemple en actions et s’attendent à recevoir des dividendes sur l’exercice de 2019, par exemple.

Le gouvernement s’est déjà prononcé en disant que finalement, il n’y aurait pas de problème pour les entreprises qui se sont prononcés avant le 27 mars.

Donc ces actionnaires là continueront à bénéficier de leurs dividendes. Est-ce que votre loi reviendrait sur ça, si d’aventure, elle venait à passer au Parlement ?

 

Michel ZUMKELLER :

Moi, je crois que la cohérence, c’est : on touche les dividendes quand l’entreprise va bien. C’est ça la règle.  Je suis foncièrement  dans cette logique-là 

Quand une entreprise ne va pas bien, elle a besoin du soutien public pour que son activité perdure. Il est normal que les actionnaires ne touchent pas de dividendes. 

Cela peut être provisoire, si l’entreprise repart, pourquoi pas ? Mais je crois qu’il faut vraiment sanctuariser les choses. C’est important. 

Il est important de montrer que l’argent ne peut pas tout faire. Nous sommes peut-être dans cette crise parce que l’on a cru que l’argent était roi. Il faut le comprendre pour préparer l’avenir et réorganiser la société.

C’est facile de dire : « Moi, je suis un chef d’entreprise, je suis indépendant. Quand ça ne va pas c’est l’État qui m’aide mais dès que ça va, j’en profite de nouveau. » Je crois que non, il faut marquer les choses. C’est aussi une manière de préparer, peut être, le monde qui arrive. 

 

Alexandre IMPERIALE:

Corrigez-moi si je me trompe,  dans votre démarche, il y a aussi cet esprit de dire : il faut une juste contrepartie à la solidarité nationale. 

Dès lors que l’argent du contribuable intervient pour venir en aide à certains secteurs économiques, on doit être exemplaire, en contrepartie, du côté de l’actionnariat.

 

Michel ZUMKELLER :

C’est tout à fait ça. Ou alors on ne manque de rien et on essaye de s’en sortir tout seul. Mais on voit bien que la situation s’avère être très compliquée.

Si on demande à la solidarité  nationale d’intervenir et bien faisons preuve de solidarité en retour !  Plutôt que de prendre des dividendes, réinjectons l’argent dans l’entreprise pour la rendre plus performante sur les prochaines années et en tirer de nouveaux profits et bénéfices. Mais pas de dividendes au moment où ça va mal.

 

 Alexandre IMPERIALE:

D’un point de vue pratique, avez-vous eu des échos dans votre circonscription ou parmi les gens que vous rencontrez au quotidien ? Quelques avis sur votre proposition de loi ?

 

 Michel ZUMKELLER :

Globalement, elle est plutôt bien perçue. Je pense que les gens comprennent.

On peut être, comme nous, favorables à l’entreprise, mais pas lui laisser faire n’importe quoi.

D’ailleurs, ce n’est pas l’entreprise ça, c’est le mauvais côté du capitalisme. C’est-à-dire : je tire profit de l’entreprise, quelle que soit sa situation. Ce n’est pas normal.

Globalement, les gens comprennent et sont même plutôt très favorables à ce type de mesure.

 

Alexandre IMPERIALE :

C’est très intéressant et vous être optimiste quant à l’issue du vote, à propos de la PPL ? Comment le sentez-vous ?

 

Michel ZUMKELLER :

D’expérience, c’est toujours très volatile.

Ce que je vois, c’est que beaucoup de nos collègues de groupe ont cosigné. Mais il y a aussi des collègues d’autres groupes : des collègues des LR, d’autres du groupe Liberté Territoires ou du groupe GDR. 

Plus on sera nombreux, plus se sera transversale, plus on aura une petite chance après. Dans tous les cas, c’est important de poser le sujet.

C’est important de montrer au gouvernement que ça ne peut pas être seulement une décision basé sur le volontariat. 

Il serait bien que cette mesure soit introduite dans les mesures du Gouvernement. Il faut espérer, se battre et  la diffuser au maximum. 

 Alexandre IMPERIALE :

Écoutez, c’est très intéressant et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle on a voulu que vous nous partagiez les raisons qui vous ont motivé à déposer cette PPL.

En tout cas, même si elle n’aboutit pas, d’un point de vue légal, on peut en tout cas se féliciter qu’un député UDI ait porté cette idée, l’ait agité pour montrer que même si le gouvernement communique dessus, ce n’est pas forcément sanctuarisé et qu’on pourrait en tout cas, vu la situation actuelle, passer entre les mailles du filet.

Cette proposition de loi, si elle passait, permettrait de pallier cette situation qui serait inacceptable et incompréhensible pour beaucoup.

 

Michel ZUMKELLER :

C’est ça.

À l’UDI, nous sommes foncièrement favorables à l’entreprise et à l’esprit d’entreprise.

Il faut montrer aussi que l’esprit d’entreprise, ce n’est pas ça.  Ce n’est pas profiter de la situation.

L’Esprit d’entreprise, c’est serrer les coudes quand ça va mal. Demander une aide quand on a besoin. Mais repartir aussi  soudés et utiliser l’argent des bénéfices qu’on pourrait avoir pour reconstruire l’entreprise.

C’est aussi une belle image à montrer. On a besoin des entreprises, des chefs d’entreprises, de ceux qui font vraiment vivre leur entreprise, et  quelque part, le pays.

 

Alexandre IMPERIALE: 

Merci beaucoup Michel Zumkeller. C’était très intéressant.

Une petite dernière question un peu plus informelle comment se passe ce continument pour vous?

 

Michel ZUMKELLER.

Écoutez, pour moi, ça va, personnellement.

J’ai la chance de ne pas être malade, de pouvoir travailler.

Maintenant, j’espère que nous arriverons à proposer autre chose et à sortir du confinement.

Le déconfinement est un sacré enjeu. Nous en avons besoin, parce que c’est aussi une manière de vaincre la maladie. 

C’est toujours trop facile, de dire « il y a qu’à  » et  » faut qu’on ».

Mais en tout cas,  pour ma part, le confinement se passe bien.

J’ai quand même hâte qu’on en sorte et qu’on arrive à remettre le pays à flot, dans le respect, évidemment, de toutes les règles sanitaires.

Il faut évidemment respecter, toutes les mesures, barrières pour qu’on en sorte et qu’on reparte. On en aura besoin.

Notre pays et beaucoup d’autres dans le monde vont être dans une situation difficile.

Cette crise doit être aussi une manière de préparer l’avenir.

Une crise, c’est aussi ça, quelquefois, partir sur un monde, peut-être meilleur.

 

 

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