Tensions sociales et accord budgétaire à trouver : une ligne de crête
Valérie Gonzo-Massol, Conseillère départementale de Haute-Savoie, Vice-présidente du SDIS 74, Présidente de la Fédération de Haute-Savoie et Secrétaire nationale au dialogue social
Ce 18 septembre, l’intersyndicale s’est mobilisée contre le budget de l’État annoncé par l’ancien Premier ministre, François Bayrou. J’entends les inquiétudes qui s’expriment : la crainte d’un déclassement, des tensions structurelles qui fragilisent des filières entières, le sentiment d’un modèle français qui se fissure.
Face à cela, la seule méthode qui vaille, c’est l’écoute entre les partenaires sociaux, patronaux et l’État à la recherche d’accords utiles. Le dialogue n’est pas une idée en l’air : c’est la condition pour éviter les décisions hors sol.
Le nouveau Premier ministre a été nommé avec une ligne de « rupture ». Manifester avant toute annonce peut paraître singulier ; d’aucuns diront que c’est notre “sport national”. Mais ne nous trompons pas de séquence : si l’expression dans la rue appartient à notre culture, la construction des solutions relève d’abord de la table de négociation. Ouvrons-la franchement et méthodiquement.
La société se radicalise, la tentation grandit de “prendre à l’autre” plutôt que de bâtir ensemble. L’effervescence autour de la “taxe Zucman” en est un révélateur : il y a une soif de justice fiscale, que je respecte, mais elle ne doit pas se transformer en réflexe de stigmatisation. La bonne réponse est une fiscalité lisible, efficace, applicable, qui lutte contre l’évasion, fait contribuer justement les plus hauts patrimoines et soutient le travail, les territoires et l’investissement productif.
Car nous avons une réalité incontournable : l’état de nos finances publiques et le coût de la dette pèsent comme une épée de Damoclès au-dessus du budget de l’État. Et oui, il faudra consentir à des efforts collectifs. Mais une seule boussole doit guider ces efforts : la justice sociale. Préserver le pouvoir d’achat, c’est aussi parler logement, loyers, accès au crédit, rénovation énergétique. Aucune réforme ne réussira si elle ignore la fiche de paie, le panier de courses et le loyer.
Je veux aussi être claire sur un point. Si je promeus le dialogue social comme pierre angulaire de notre République, la violence et les casseurs n’en font pas partie. On peut contester, on peut débattre, on peut convaincre ; on ne peut pas casser. Chaque dégradation, chaque agression, c’est un pas de plus vers la défiance générale et un pas de moins vers les solutions.
Le moment exige du calme, des actes et une écoute exigeante. Mobilisons-nous, oui, mais mobilisons-nous surtout pour réussir : ouvrir la porte du dialogue, sécuriser les secteurs en tension, tenir nos comptes, et rendre au mot “justice” sa pleine force sociale. Ce n’est à cette condition que le budget pourra être non pas subi, mais compris et accepté.
