« National Security Strategy 2025 », publication de l’administration américaine : une claque pour l’Europe

Jean-Baptiste Noé, Docteur en histoire et rédacteur en chef de Conflits

 

La publication de la National Security Strategy 2025 (NNS 2025) a été une claque pour l’Europe, car elle vient corroborer au plus haut niveau ce que beaucoup pressentait : pour les États-Unis, l’Europe compte de moins en moins.

 

L’administration Trump a deux priorités : les questions intérieures et la Chine. Pour elle, l’Europe devient périphérique dans sa vision stratégique. D’où la volonté de Donald Trump d’en finir au plus vite avec la guerre d’Ukraine et de laisser le fardeau de la reconstruction aux Européens. Toutefois, l’Europe continue d’occuper une place centrale en tant que pilier de l’architecture stratégique américaine. Le document présente le continent non seulement comme un espace à défendre face à la Russie, mais aussi comme un partenaire clé dans la compétition mondiale contre les régimes autoritaires. Washington insiste sur la nécessité d’une Europe « forte, unie et capable », c’est-à-dire capable de soutenir l’OTAN, de moderniser ses forces armées et de partager davantage le fardeau stratégique. La NSS 2025 reste claire : l’Europe demeure dépendante de la garantie de sécurité américaine, et sa stabilité conditionne directement la capacité des États-Unis à concentrer leurs efforts sur l’Indopacifique. En somme, le document voit l’Europe comme un partenaire indispensable, mais dont la sécurité doit être consolidée, afin qu’elle puisse jouer pleinement son rôle dans la compétition globale que Washington considère désormais comme structurante.

 

Au moins les choses sont-elles claires et les faux-fuyants ont disparu. Cette vision n’est fondamentalement pas très différente de celle des prédécesseurs de Donald Trump. Mais elle est exposée ici avec brutalité et sans chercher à ménager les partenaires européens.

 

En cela, elle peut jouer un véritable électrochoc pour que les Européens passent à l’acte afin de garantir leur propre défense et de ne plus dépendre des États-Unis. Mais cela suppose des budgets conséquents et d’encourager le métier des armes, ce qui contrevient à plusieurs décennies de politique inverse. Cela suppose également une politique européenne de défense qui ne soit pas que des mots, mais qui se manifeste aussi dans les commandes d’armement réalisées par les États.

 

L’autre défi est celui de l’adhésion au modèle politique de la démocratie libérale. En menant une politique brutale et changeante, Donald Trump fragilise les fondements de la démocratie et rend ce modèle moins désirable. Le partenariat démocratique qui existe entre les deux rives de l’Atlantique est ainsi fragilisé, avec le risque d’un démantèlement pur et simple. Et donc de créer un attrait pour d’autres modèles politiques. Face à cette nouvelle pièce de doctrine américaine, c’est donc l’ensemble des pays d’Europe qui doivent revoir leur propre stratégie.