Drame du narcotrafic à Marseille

Frédéric Guelle, Conseiller métropolitain Aix-Marseille-Provence et Conseiller d’arrondissement des 9e et 10e de Marseille

 

J’ai habité le quartier sensible de La Cayolle, 9e arrondissement de Marseille, pendant vingt ans. Aujourd’hui élu de ce secteur, je parle de ce territoire que je connais intimement : un quartier du sud de Marseille, aux portes des Calanques, magnifique mais fragilisé depuis des décennies par des dynamiques qui dépassent largement ses habitants.

Ici, le trafic de drogue n’a jamais été un accident : c’est une structuration ancienne, visible à travers les guetteurs, les intimidations, les pressions silencieuses et les rodéos qui rythment les soirées.

 

L’assassinat de Mehdi Kessaci, le 13 novembre, n’a pas été vécu comme un basculement, mais comme l’issue logique d’un enchaînement de forces profondes : économie parallèle toujours en expansion, réseaux solidement enracinés, sentiment d’impunité. Depuis trop longtemps, ces réalités pèsent sur la vie quotidienne, même si la puissance publique agit.

 

Il faut le dire clairement : les politiques publiques ont largement investi dans La Cayolle pour maintenir un équilibre fragile. La rénovation urbaine issue de la dynamique Borloo a transformé des logements, créé des espaces plus dignes et amélioré le cadre de vie. La Métropole a prolongé la ligne du bus 23 jusqu’à 1 heure du matin et déployé des vélos électriques, afin de désenclaver l’un des quartiers les plus isolés du Sud marseillais. Ce sont des actions utiles, visibles et structurantes.

 

Mais la réalité sociale demeure plus profonde. Les violences (voitures brûlées, tirs ou heurts récurrents avec la police) continuent d’éroder la confiance des habitants. Les familles demandent aujourd’hui une chose simple : investir dans l’humain.

 

Car La Cayolle tient grâce à ses piliers éducatifs, culturels et sportifs. L’école des Calanques et le collège du Roy d’Espagne jouent un rôle central. C’est là que se construisent les repères, la résilience et la citoyenneté. La formation de la jeunesse n’y est pas un enjeu parmi d’autres, elle est essentielle pour empêcher l’emprise des réseaux.

 

Les Petits Violons, association qui fait pratiquer le violon une heure par jour aux enfants de l’école, montrent que la culture peut offrir dignité et perspectives, tandis que le S.C. Cayolle, par le football, maintient le lien social, canalise les énergies et protège une partie de la jeunesse.

 

Un quartier n’est jamais condamné, mais pour éviter que l’histoire ne se répète et que l’emprise des caïds ne s’étende encore, il faudra poursuivre les investissements publics, les adapter, et surtout placer l’humain au centre de toute action.