L’accueil des chercheurs américains en France : une opportunité à structurer durablement

Mohamed Benharouga, Adjoint au Maire de Sassenage (38) et professeur d’Université

Sous la présidence de Donald Trump, les politiques migratoires et scientifiques des États-Unis ont suscité de vives inquiétudes au sein de la communauté universitaire internationale.

Le retrait de certains accords internationaux, les restrictions de visas pour les chercheurs étrangers, ainsi qu’une rhétorique ouvertement antiscience ont conduit de nombreux scientifiques, américains et étrangers, à envisager un départ vers des destinations perçues comme plus accueillantes. L’Union européenne, consciente de cette opportunité, s’est positionnée comme un espace favorable à une recherche libre, ouverte et collaborative.

  

En France, plusieurs institutions ont réagi rapidement en proposant des dispositifs d’accueil spécifiques. Le CNRS et des universités de premier plan, telles que Sorbonne Université, Paris Sciences & Lettres (PSL) ou encore Aix-Marseille Université avec son programme Safe Place for Science, ont mis en place des postes temporaires, des financements ciblés et des procédures administratives simplifiées. Le programme PAUSE (Programme d’Accueil en Urgence des Scientifiques en Exil), bien que conçu à l’origine pour d’autres contextes géopolitiques, a également été mobilisé.

  

Cependant, malgré l’adhésion de principe à la défense de la liberté académique, ces initiatives ont suscité des critiques en France. Certains chercheurs et enseignants-chercheurs déplorent l’absence de moyens pérennes pour intégrer durablement ces talents dans un système déjà fragilisé par le manque de financements et la précarité des jeunes chercheurs locaux. Ils redoutent que ces actions, bien que louables, ne se fassent au détriment de la communauté scientifique nationale, en l’absence d’une vision à long terme.

  

Pour concilier solidarité internationale et équité interne, plusieurs pistes pourraient être explorées : la création d’un fonds européen dédié à l’exil scientifique, l’ouverture de postes permanents spécifiques dans les universités, ou encore le renforcement des coopérations transatlantiques. Par ailleurs, la simplification des procédures de visa, un accompagnement familial adapté et la valorisation de la diversité scientifique seraient autant de leviers pour renforcer l’attractivité de la France sans générer de tensions internes.

 

Ainsi, si l’accueil des chercheurs américains constitue une réelle opportunité, il nécessite une stratégie structurée, inclusive et durable.