« Louer » des places de prison à l’étranger ?

Bruno Coulon, Docteur en droit et spécialiste en droit pénitentiaire

Emmanuel Macron, président de la République, et Gérald Darmanin, ministre de la Justice, ont évoqué la possibilité d’incarcérer des détenus à l’étranger. Dans un sondage récent, il semblerait que 52% des Français soient favorables à la location de places de prison à l’étranger pour lutter contre la surpopulation carcérale.

 

La France atteint actuellement un taux d’occupation de 133% avec 82 921 personnes détenues pour 62 358 places disponibles.

 

 

Cette pratique est déjà à l’œuvre dans d’autres pays d’Europe. On peut relever l’exemple du Danemark, avec un accord conclu avec le Kosovo qui va lui louer 300 places dans l’une de ses prisons pour une durée de 10 ans pour un montant de 200 millions d’euros. Les premiers transferts de prisonniers vers le Kosovo sont prévus pour le 1er avril 2027. La Suède mène de son côté des discussions avec l’Estonie pour louer des places dans la prison de Tartu notamment.

 

 

En Belgique, le gouvernement est officiellement à la recherche de solutions d’externalisation comparables à ce qui a existé entre 2010 et 2016 avec les Pays-Bas : la prison de Tilburg y avait accueilli, il y a une décennie, jusqu’à 650 détenus belges pour alléger la situation de surpopulation carcérale chronique en Belgique.

 

 

Pour la France, rien n’est figé. Comme on peut l’imaginer, une telle disposition fait débat. Deux inconvénients principaux sont mis en avant : la question de « l’éloignement » des détenus de leurs proches, de leur avocat ou de l’autorité judiciaire concernée et la question des coûts financiers qui pourraient être importants.

 

 

La mise en œuvre éventuelle de cette mesure suscite aussi des questionnements sur la souveraineté et l’indépendance de la justice et aussi sur l’exercice des droits les plus élémentaires.