Pologne : Realpolitik
Christophe de Contenson, Conseiller départemental de l’Allier, Délégué au monde combattant, à la mémoire, et à la coopération internationale, chargé de l’action du Conseil départemental en faveur des exilés ukrainiens et Maire de Couzon (03)
Au lendemain de l’élection présidentielle polonaise qui a vu Karol Nawrocki, candidat nationaliste-conservateur, l’emporter d’une très courte tête devant Rafal Trazaskowski, maire pro-européen de Varsovie, faut-il s’alarmer ?
« Coup de semonce », « carton rouge » : cette dramatisation à outrance de la presse devient malsaine, alors que pourraient être évoqués les points de convergence entre le Premier ministre libéral Donald Tusk et ce nouveau président. Certes, ils devront cohabiter. La Pologne a souvent oscillé entre son héritage ultraconservateur et la volonté d’ouverture à l’Europe de ses jeunes générations.
Les journalistes ne commentaient-ils pas déjà avec exagération l’élection de Madame Meloni en 2022 ? Le temps a prouvé que la Première ministre italienne a mis, depuis, bien de l’eau dans son amaretto !
Même s’il est en mesure d’opposer son veto à certains textes de loi proposés par le Parlement, il reste très antirusse, n’hésitant pas à qualifier, il y a peu, la Russie d’État barbare. Sur l’aide à apporter à l’Ukraine, il poursuivra sans faille, même s’il ne souhaite voir son voisin adhérer à l’OTAN comme à l’Union européenne.
Il se vante d’admirer Donald Trump : quelle référence ! Depuis son élection ce dernier, rattrapé par la réalité économique et géopolitique du monde a déjà changé plusieurs fois de cap.
Alors ? L’aide aux 900 000 Ukrainiens présents sur le territoire polonais serait réservée à celles et ceux cherchant un emploi, travaillant et y payant leurs impôts. Ils sont déjà 80 % à le faire. Pour les personnes en situation de handicap, de longue maladie ou blessées de guerre, leurs cas seront étudiés avec intelligence. Évitons donc toute surenchère. Comme pour celle du président américain, voyons plutôt dans cette élection l’opportunité renouvelée d’imposer avec force une Europe soudée, déterminée sur l’échiquier mondial comme aux côtés des Ukrainiens qui vivent depuis trois ans l’enfer.
Indéfectibles alliés, portons au cœur ces vers de leur célèbre poète Taras Chevtchenko :
« Notre âme ne peut mourir,
La liberté ne meurt jamais,
Même l’insatiable ne peut
Pas labourer le fond des mers,
Pas enchaîner l’âme vivante,
Non plus la parole vivante… »