Russie : confusion et stupeur

Jean-Baptiste Noé, rédacteur en chef de Conflits

La rébellion d’Evgueni Prigojine a provoqué la stupeur en Russie et en Occident. Si l’événement a duré moins d’une journée, ce furent des heures de haute tension et d’incertitudes majeures. Plusieurs points principaux peuvent être retenus.

Tout d’abord l’imprévu comme clef de l’histoire. Alors que les analystes surveillaient l’évolution du front et l’état de la contre-offensive ukrainienne, l’affaire Prigojine a introduit un événement imprévu, que le gouvernement russe a dû gérer en catastrophe et l’Occident tenter de comprendre et d’expliquer. Démontant les thèses du déterminisme historique, cet événement démontre une fois de plus que ce sont les hommes qui font l’histoire, que rien n’est écrit d’avance et que les États doivent apprendre à gérer les imprévus.

Deuxièmement, la réintégration réussie de Wagner. La révolte de Prigojine est une opposition à l’intégration de Wagner dans l’armée russe, qui a malgré tout eu lieu. Dans sa seconde intervention télévisée, Poutine a donné trois possibilités aux hommes de Wagner : partir en Biélorussie, quitter Wagner, rejoindre l’armée régulière. La volonté du ministère de la Défense l’a donc emportée : la société d’armement perd son autonomie et l’état-major en reprend le contrôle. De ce point de vue, le pouvoir de Poutine en sort plutôt consolidé.

Troisièmement, l’ébranlement. Que Prigojine ait pu se révolter, entrer dans le QG du commandement de Rostov-sur-le-Don, lancer des véhicules sur la route de Moscou témoigne d’un grand flottement dans l’organisation russe. Lui-même a évoqué « des failles de sécurité », ce qui démontre que le pouvoir russe est loin de tout contrôler et de tout surveiller.

On constate que Prigojiine n’a rallié personne autour de lui, ce qui est l’une des raisons de sa rentrée dans le rang. Les véritables questions concernent l’avenir de Wagner et donc l’avenir de la projection russe. Si l’unité est en cours de dissolution sur le front ukrainien, que va-t-elle devenir dans les autres pays où elle est engagée, notamment en Afrique ? Un territoire où elle a signé de juteux contrats, bien plus rémunérateurs et moins dangereux que ses interventions en Ukraine. On voit mal la Russie se passer de ce levier de puissance ou bien s’engager directement sur ses fronts, sans passer par une personne tierce comme Wagner le fit.

Quant au front ukrainien, cela ne changera pas grand-chose : Wagner était retiré depuis plusieurs semaines déjà et l’armée ukrainienne a de sérieuses difficultés à franchir le premier rideau. Après la stupeur du week-end, les affres du quotidien de la guerre ont repris.

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