Une caméra à chaque interpellation : la proposition de l’UDI déposée à l’Assemblée Nationale

Le président de l’UDI Jean-Christophe Lagarde a déposé une proposition de loi visant à rendre obligatoire l’usage des caméras-piétons lors de chaque interpellation par un policier ou un gendarme. 

La porte-parole de l’UDI Sophie Auconie a relayé cette proposition en interpellant Christophe Castaner lors des Questions au Gouvernement. 

L’objectif de cette proposition est l’impunité zéro : plus d’impunité pour les délinquants qui agressent les policiers, et plus d’impunité non plus pour l’extrême minorité de policiers qui se comporte mal.

PROPOSITION DE LOI

visant à généraliser l’emploi de caméras individuelles

par la police nationale et la gendarmerie nationale

                     

Par la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement, et améliorant l’efficacité et les garanties de la procédure pénale, les agents de la police nationale et de la gendarmerie nationale ont été autorisés à utiliser des caméras individuelles dans l’exercice de leurs missions de prévention des atteintes à l’ordre public.

 En outre, l’expérimentation pour une durée de deux ans des caméras mobiles au bénéfice des agents de police municipale relevant du périmètre d’une zone de sécurité prioritaire ayant été très fortement conclusive, le législateur a étendu davantage la portée de l’emploi de ces caméras-piétons par la loi n°2018-697 du 3 août 2018, permettant aux policiers municipaux, aux sapeurs-pompiers, ainsi qu’aux surveillants de l’administration pénitentiaire de bénéficier pleinement de cette technologie.

 Cet usage de la caméra mobile est aujourd’hui purement facultatif. Il existe simplement un cas pour lequel l’intervention est obligatoirement filmée : lorsque la personne faisant l’objet d’une interpellation le demande.

 Aujourd’hui, la généralisation de l’usage des caméras individuelles au bénéfice des forces de l’ordre en toute circonstance nous paraît être une réponse appropriée au climat de méfiance réciproque généralisée qui traverse la société française et que nous considérons comme porteur potentiel de conflits violents dans notre pays.

 En premier lieu, les forces de l’ordre expriment une lassitude et un sentiment de profond découragement contre les agressions et violences récurrentes dont elles sont victimes. Les outrages et violences contre une personne dépositaire de l’autorité ont augmenté de 60 % depuis 2005. Cette très forte augmentation en à peine deux décennies use très fortement nos forces de l’ordre, en attente de réponses législatives et d’outils techniques pour que ces violences soient non seulement contenues, mais refluent rapidement.

 En second lieu, qu’on le veuille ou non, une forte inquiétude germe dans une partie de la société française contre les violences volontaires imputées à des policiers. D’après un sondage ELABE sur Les Français et les violences policières de juin 2020, 98 % considèrent que ces violences existent et 37 % considèrent que certains policiers font preuve d’un usage excessif de la force.

 L’essor des réseaux sociaux amplifie cette fracture entre deux France qui peinent à se comprendre : la diffusion régulière de vidéos d’interpellations sorties de leur contexte visionnées plusieurs millions de fois contribue à enflammer l’opinion publique et à amplifier la perception de la fréquence de ces dérives individuelles qualifiées de « violences policières ».

 La généralisation de l’emploi des caméras individuelles lors de chaque interpellation par la police nationale et la gendarmerie nationale en France nous paraît être un outil approprié pour réconcilier et apaiser la société française.

 Premièrement, cette technologie sécurisera les forces de l’ordre lors des interventions. Le rapport du député du groupe UDI et Indépendants Christophe NAEGELEN sur la situation, les missions et les moyens des forces de sécurité, qu’il s’agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale a d’ailleurs montré un très fort désir de renforcer l’emploi de ces caméras individuelles. Au sein de la gendarmerie, 72 % des répondants au sondage de la commission d’enquête étaient favorables à la généralisation de cette pratique. Les fausses accusations à l’encontre des forces de l’ordre seront ainsi immédiatement écartées grâce à des éléments de preuve objectifs et indéniables : une étude de l’université de Cambridge menée en 2000 auprès de policiers britanniques et américains bénéficiant de tels équipements a fait apparaître une diminution de 93 % des plaintes contre les policiers.

 Deuxièmement, l’universalisation des caméras individuelles protégera les citoyens contre toute dérive potentielle théorique. Face aux comportements violents d’une extrême minorité des forces de l’ordre, la crainte et la peur éprouvée par certains de nos concitoyens respectueux des lois disparaîtront grâce à la généralisation des caméras individuelles. La découverte d’un groupe d’échanges sur Facebook entre plusieurs milliers de policiers tenant des propos manifestement racistes interpelle évidemment d’autant plus que ces convictions peuvent interférer avec le bon exercice de leur fonction. Si l’institution policière est profondément républicaine, il est évident que comme dans tout corps constitué, certains individus minoritaires peuvent faire preuve de comportements délictueux que la généralisation des caméras individuelles en interpellation rendra impossibles sous peine d’encourir des sanctions.

 Troisièmement, un emploi universel de ces caméras lors de chaque interpellation permettra d’apaiser considérablement les relations entre les forces de l’ordre et les citoyens. La présence d’une caméra, filmant les échanges et dont les images récoltées pourront être utilisées dans le cadre de procédures judiciaires, contribue énormément à la modération des propos et à tempérer la relation conflictuelle que peut engendrer une interpellation.

 Enfin, cette généralisation de la caméra-individuelle est incontournable compte tenu de l’explosion de la diffusion de contenus vidéos amateurs. L’essor des réseaux sociaux s’est accompagné d’une montée en puissance du nombre de vidéos amateurs d’interpellations ou d’arrestations visionnées plusieurs millions de fois. Pas une seule semaine ne passe sans que des extraits tronqués d’interpellations musclées par des policiers ou des gendarmes ne soient relayées massivement. Nos concitoyens interpellés ont de plus en plus souvent le réflexe quasi immédiat de filmer leurs échanges avec les forces de l’ordre. L’association de défense des droits de l’homme ACAT constatait « de plus en plus l’utilité des vidéos amateurs, souvent seul élément de preuve tangible pour accréditer une version des faits ou une autre ». Ces vidéos jouent parfois une fonction de « lanceurs d’alerte », mais ces images amateurs sont souvent diffusées sans la moindre contextualisation, sont coupées, et ne donnent qu’une vision partiale et tronquée des cas d’espèce qu’ils prétendent révéler au grand jour. Le législateur ne peut pas ignorer ce mouvement de société et se doit de contrebalancer la diffusion de ces vidéos amateurs par des documents audiovisuels exhaustifs et objectifs qui permettront d’apprécier la teneur réelle des échanges et de garantir l’impartialité des procédures engagées.

 La caméra-individuelle généralisée permet d’avancer vers une société de l’impunité zéro : il n’y aura plus d’impunité pour les délinquants et les voyous ni pour l’extrême minorité de policiers faisant preuve de comportements manifestement racistes ou excessivement violents.

 Cette proposition de loi ambitionne d’équiper chaque policier et gendarme d’une caméra individuelle. Pour être pleinement effective, cette mesure législative doit donc s’accompagner d’un réel effort budgétaire et technologique de l’État afin d’équiper nos forces de l’ordre de manière adéquate. L’essor de la généralisation des caméras-piétons a été très fortement freiné jusqu’à présent par la piètre qualité des matériels attribués à nos forces de l’ordre. L’insuffisante autonomie de la batterie des caméras a empêché tout déploiement significatif de cet outil, à tel point que de nombreux policiers ont pris l’initiative d’acquérir leurs propres Go-Pro avec leurs fonds personnels. Il est du devoir de l’État d’engager les moyens nécessaires pour rendre effectifs les principes fixés par le législateur.

Article 1er

 L’article L. 241-1 du code de la sécurité intérieure est ainsi rédigé :

« Art. L. 241-1. – Dans l’exercice de leurs missions de prévention des atteintes à l’ordre public et de protection de la sécurité des personnes et des biens ainsi que de leurs missions de police judiciaire, les agents de la police nationale et les militaires de la gendarmerie nationale doivent procéder en toute circonstances, au moyen de caméras individuelles, à un enregistrement audiovisuel de leurs interpellations.

Les enregistrements ont pour finalités la prévention des incidents au cours des interventions des agents de la police nationale et des militaires de la gendarmerie nationale, le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuves ainsi que la formation et la pédagogie des agents.

Les caméras sont portées de façon apparente par les agents et les militaires. Un signal visuel spécifique indique si la caméra enregistre. Le déclenchement de l’enregistrement fait l’objet d’une information des personnes filmées, sauf si les circonstances l’interdisent. Une information générale du public sur l’emploi de ces caméras est organisée par le ministre de l’Intérieur. Les personnels auxquels les caméras individuelles sont fournies peuvent avoir accès directement aux enregistrements auxquels ils procèdent aux seules fins d’effectuer leurs missions de rédaction des procédures.

Les enregistrements audiovisuels, hors le cas où ils sont utilisés dans le cadre d’une procédure judiciaire, administrative ou disciplinaire, sont effacés au bout de trois mois.

Les modalités d’application du présent article et d’utilisation des données collectées sont précisées par un décret en Conseil d’Etat, pris après avis de la Commission nationale de l’informatique et des libertés. »

Article 2

La charge pour l’État est compensée, à due concurrence, par la création d’une taxe additionnelle aux droits mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

 

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